CHAP 6... Les révoltes serviles
Elles ont pour causes les conquêtes de Rome et leurs conséquences. Elles ont en retour d'immenses répercussions sur la société italienne.
I] Les origines des guerres serviles
A/ Le nombre des esclaves
Les guerres de conquêtes, les
brigandages, la piraterie qui alimente les marchés d'esclaves sont les principales
sources d'approvisionnement avec l'esclavage involontaire et la reproduction.
Beaucoup d'historiens se sont penchés sur le nombre d'esclave. On retient
deux études : P.A. Brunt, Italian Manpower, Oxford, 1971. Il évalue
le nombre d'esclave à 3 millions sur une population totale, Cisalpine comprise de 7,5
millions. Soit pratiquement 50%. Plus récemment, J.C. Dumont, Servius,
conclut que le chiffre de 32% est un minimum et que la vérité doit se situer entre 32 et
50%. Il reste à évoquer que l'espérance de vie à la naissance de ces esclaves oscille
autour de 20 ans, soit moitié moins qu'un romain.
Les esclaves étaient sous une forme de dépendance maximale, ors selon la
loi et le droit grec en Sicile, le maître doit protéger son esclave ; il lui doit
l'entretient (gîte, couvert et habits). Les maîtres ont néanmoins le droit de vie ou de
mort sur leurs esclaves.
Ce qui change avec les conquêtes,
c'est la présence d'armada d'esclaves dans les latifundia. Le maître en a peur, d'où l'importance de l'intendant qui doit
maintenir l'obéissance. C'est cette nouvelle dureté des maîtres qui va entraîner les
révoltes.
Notamment en Sicile, les maîtres tiennent l'esclavage comme
définitif, les esclaves comme du bétail. Il n'y a donc plus l'espoir de
l'affranchissement, accompagné d'une dureté renouvelée : les chaînes, les lourdeurs
des tâches, la recherche du profit qui néglige l'entretien des esclaves, les châtiments
corporels parfois non-justifiés.
B/ L'action des meneurs
Ils sont souvent d'origines orientales : syriennes, thraces. Ils disposent d'un certain ascendant sur leurs compagnons de servitude, qu'il soit religieux, morale ou physique. La notabilité d'un certain nombre des dirigeants de révoltes est réelle, s'accordant avec la place qui leur est accordé par leur maître dans l'exploitation agricole. Cléon, un des chefs de la révolte de 135-133, était à la tête d'un élevage de chevaux, Athenion (104-102) était un villecus, un intendant. Spartacus était la vedette de la reine, le princeps gladiatorum. En revanche, des hommes comme Eunus en Sicile, ou Salvius en Campanie, ont dû avoir une fonction religieuse avant de tomber en esclavage.
II] Les guerres serviles
1) Les précédents
En 217, à Rome même ; en 198, dans le sud du Latium. Mais ces révoltes ne mettaient en cause que des prisonniers de guerre
ou des otages carthaginois. En 196, on note une révolte d'esclave en Etrurie contre laquelle on envoie une légion
(6 000 hommes). 143-140, dans le Latium, le brigandage de bergers serviles :
là encore, on envoie l'armée.
2) La révolte de Sicile : 135-132
Diodore de Sicile nous indique que la
cause en fut le nombre croissant d'esclaves introduits dans l'île, surtout après la
Deuxième Guerre Punique. Il ajoute que cette masse se trouve aussi bien chez les
propriétaires grecs que romains. Mais il poursuit que depuis les années 140,
existe en Sicile une
insécurité grandissante due à des bergers dans l'ouest de la Sicile, encouragés par
leurs maîtres, et rejoints par des fugitifs.
Il y eut des escarmouches et un propréteur dû en capturer
plusieurs pour calmer les velléités.
A l'est, se trouvent de nombreux esclaves d'origine syriennes, adorateurs
de cultes à mystères implantés en Orient, comme celui de la déesse Atargatis, ou dea
Syria, dont le sanctuaire se trouve à Héliopolis. De même pour la divinité
Déméter, déesse protectrice de la fécondité qui avait son sanctuaire à Henna.
L'un de ces Syriens, Eunous, disposait d'un réel ascendant sur ses compagnons grâce à ses dons
prophétiques. Ils appartenaient à un propriétaire d'Henna, Antigénès. Son maître l'emmenait dans les dîners, il avait pour
"épouse" une esclave syrienne, ce qui montre sa notabilité. Lui et sa femme
sont portés à la tête de la révolte par les esclaves d'encadrement.
Au même moment, à l'ouest, Cléon, un brigand Silicien, se fait attribuer l'élevage de chevaux : il est
magister.
La révolte commence à Henna contre un propriétaire et sa femme, tous deux cruels ; leur fille,
gentille, est épargnée. Dans l'ouest, Cléon a prit le maquis et en quelques jours, des
milliers d'esclaves se concentrent et prennent la ville d'Henna. Eunous est proclamé roi
avec le titre d'Antiochos, et
Cléon se met sous ses ordres. Eunous et ses conseillers vont créer un Etat, avec des
assemblées, une capitale qui sera Henna ; on bat monnaie au nom d'Antiochos. Les
habitants des villes prises furent massacrés, les artisans tournés en esclavages.
Ensuite arrive les divergences : Eunous est pour la clémence, d'autre pour la
répression. Ce qui est étrange est l'arrivée au sein des révoltés de petits et moyens
propriétaires.
La révolte fut difficile à mater. Deux années et deux consuls furent
nécessaires pour en venir à bout. Les romains reprirent la ville de Messine et après un long siège, Henna est reprise en 132,
Cléon est tué, Eunous capturé et enfermé dans une prison ou il meurt.
Ce soulèvement est très riche par ses composantes et
son esprit. Ce n'est pas un mouvement dirigé contre l'esclavage. Il a menacé
l'équilibre de l'île. D'autre part, Rome a reconquis l'île et la réorganisée.
3) La révolte de Campanie et de Sicile (104-102)
On retrouve des similitudes. Au départ, un chevalier romain Titus Vettius tombe amoureux fou d'une
esclave ; tellement qu'il décide d'armer ses esclaves et appelle les autres esclaves à
le rejoindre. Ces désordres gagne la Sicile à nouveau.
A l'Est, un certain Salvius prend le titre de Tryphon. A l'ouest un villecus, Athenion prend
aussi le titre de roi, lève 10 000 hommes pour se constituer une armée. Mais il refuse
d'enrôler les esclaves, les renvoyant aux champs !
Pour les romains, il faudra plusieurs campagnes pour
venir à bout des révoltés, en 101.
4)
La révolte de Spartacus (73-70)
Elle se déroule du Sud au Nord de
l'Italie, à un moment même, elle menace Rome. Les effectifs sont considérables : autour
du noyau de gladiateurs se concentrent 150 000 soldats !
A Capoue, dans une école de gladiateurs se
trouve Spartacus, plus grec que
Barbare. Le mouvement de révolte est spontané, et à ce titre, il va souffrir
d'improvisations.
Le noyau de gladiateurs est rejoint par des bandes d'esclaves gaulois
dirigés par Crixus et des
esclaves Cimbres dirigés par Hoenomanus. Ils occupèrent le cratère du Vésuve, bon site défensif, et battirent à plats de coutures le préteur
chargés de les mater.
Des bergers appenins se joignent alors à eux. Les
esclaves se divisent en deux bandes, l'une dirigée par Crixus, l'autre par Spartacus. Ils
occupent l'année à piller le sud d'Italie. Crixus était d'avis de saigner le pays,
Spartacus voulait ramener chez eux les esclaves.
En 72, Rome envoie contre les esclaves deux consuls. Crixus
fut tué ; Spartacus remonte le pays et vainc le gouverneur de la Gaule Cisalpine à Modène.
Le Sénat de Rome envoie alors l'armée dirigée par Licinius Crassus. Il lève 6 légions (36 000
hommes) ; il bloque Spartacus dans le Bruttium, mais ce dernier passe à travers au cours de l'hiver (72-71).
A titre d'exemple, Crassus crucifia le long de la via appia 6 000 esclaves. Les restes
de l'armée furent écrasés par Pompée de retour d'Espagne.
C'est la dernière grande révolte servile.
La révolte de Spartacus n'engage pas de nouvelles législations.
Désormais, à chaque velléité insurrectionnelle, les romains répondront par la
répression. La condition des esclaves n'est pas améliorée, au contraire. Seulement,
jamais plus les esclaves ne seront une menace.
La révolte de Spartacus est restée un mythe.
Texte établi à partir d'un cours de
faculté suivi en 1998-9
Grands Mercis au professeur
Mise à jour du : 28/03/99