CHAP 4... La société française sous la IIIe République ; quel équilibre ?
C'est une question importante : la IIIème République est un régime long qui doit faire face à une série d'épreuves. Mais elle tient bon et se renforce. Et pour la première fois depuis 1789, un régime politique est stable, comme si le pays avait cherché un régime depuis 1815. Cette stabilité entre 1870 et 1940, soit presque un siècle, fait apparaître rétrospectivement les régimes précédents comme des essais.
1) L'importance de la
famille
Elle ne cesse d'évoluer. Il y a une histoire
de la famille et à cette époque ci, elle ne joue pas du tout le même rôle
qu'aujourd'hui. C'est un ensemble de liens certes, mais c'est là un aspect secondaire :
c'est avant tout un ensemble économico-social.
Malgré les
grandes sociétés par actions, il s'agit bien souvent de sociétés familiales ou le
capital à été partagé entre les éléments de la famille. Dans le petit commerce,
c'est encore plus évident, avec l'exemple du chapitre précédent. La famille joue le rôle d'amortisseur social : un membre peut
se trouver sans travail, ce ne sera pas dramatique : il y a tours une affiliation.
La pluriactivité permet de varier les sources
de revenu, de profiter de l'industrialisation, et en cas de crise grave, on peut se
replier sur la terre ou l'atelier familial.
En France domine la petite bourgeoisie, et voilà les
bases de la stabilité sociale.
Dans
certains milieux ruraux pauvres et ouvriers, il y a un certain nombre d'enfant légitime.
Mais la restauration du divorce en 1884 ne les multiplie pas, non plus le
nombre de divorce. L'institution familiale est donc un lien
de subsistance en premier lieu. C'est une grande différence
avec aujourd'hui. La famille est une sécurité.
Mais, les
jeunes donnent leur salaire au parent. Ils n'ont donc pas d'autonomie. L'autorité du
père est primordiale ; c'est une société patriarcale. De même, l'âge moyen au mariage est élevé : 28 ans pour les garçons
et 26 ans pour les filles, alors que l'espérance de vie est courte. Le mariage est tardif
à cause de l'autorité du père et car il est important de conserver le patrimoine.
La famille
est donc une structure souple, mais elle doit être comprise dans un ensemble économique
et culturel.
2) Les caractères de la croissance économique
La
stabilité familiale se traduit par l'incapacité à donner des taux de croissance
élevés. Pendant la Grande Dépression jusqu'en 1896, la production
industrielle s'accroît de 1,6% par an. Pendant la Belle Epoque et l'entre deux guerres :
2,5% et l'agriculture : 0,1%
Cette croissance modérée à aussi ses bons
côtés pour la crise de 1929. En France, elle n'est pas une catastrophe. On
pense aux 6 millions de chômeurs allemands ; en France : 500 000. Mais les statistiques
non de sens que rapporté au social. L'Allemagne est fortement industrialisée. Les
chômeurs sont donc en marge. Mais en France, domine la petite entreprise. Les femmes qui
perdent leur travail rentrent à la maison et ne sont pas comptabilisées. Les
ouvriers-paysans se replient sur leur terre ; ils vivent mal mais vivent. Ils ne sont pas
comptés. L'immigration est réduite, arrêtée, puis renvoyés chez eux ; ce ne sont là
encore pas des chômeurs. Le chômage est faible car la société à pu se replier sur le cadre familial.
De même,
le nombre d'heures de travail est réduit. La crise existe et elle est profonde, mais elle
ne prend pas la forme d'un cataclysme. Par contre, les rentiers nombreux sont frappés à
mort, déjà affaibli par l'inflation.
L'évolution
par secteur d'activité est sage.
Primaire | Secondaire | Tertiaire | |
1906 | 43,2 | 29 | 26 |
1931 | 36,4 | 33,1 | 29,6 |
Le secteur dominant est le
primaire. L'industrie a augmenté un peu, le tertiaire aussi. C'est équilibré, dans une
lente modernisation. Mais les statistiques cachent les disparités : crise du textile mais développement de l'automobile, développement
des grandes propriétés céréalières du bassin parisien et crise de la polyculture.
3) La situation démographique
1921:
39 millions 1931 : 42 millions de français
On voit que
la population évolue peu, la France est marquée par le déficit des naissances de la
première Guerre Mondiale, d'une politique malthusienne liée à la famille : on veut garder le patrimoine.
Mais des
régions se développent : Paris,
Lyon, Nord, Lorraine. Par contre, elle stagne ou diminue
dans les campagnes et petites villes à industries traditionnelles : textiles, cuirs.
Il y a une
France moderne à l'Est ; nord-est alors que la France de l'Ouest est en stagnation.
La
croissance est assurée par un exode rural léger mais surtout une forte immigration
(italienne en lorraine). On voit des vagues migratoires correspondre aux périodes de
prospérité : Belle Epoque et les années 1920, mais aussi une montée de la xénophobie
pendant les années de crises : années 30
Tout ceci
fonctionne autour de la famille et du patrimoine.
Il colmate surtout les brèches dans le monde ouvrier.
Les ouvriers sont à la fois citoyen avec le droit de vote, le droit à la
liberté, égalité, fraternité mais également ils ont absence de droits sociaux pendant
une longue période. Et les années 1880 voit le problème devenir criant. Le 1er
mai 1891 : fusillade de Fourmies (tir sur des grévistes). Il y a des tensions sociales d'où l'importance
pour l'Etat de jouer au pompier. Est-ce que la république est capable d'intégrer le
monde ouvrier ?
L'Etat va
prendre des mesures dans un certain type d'esprit.
1) Des lois "sociales"
Elles ont
tendance à prendre les problèmes par leur aspect familial.
Le 22 mars 1841 : interdiction du travail des enfants de moins de 8 ans. Il faut
l'entendre comme protection de l'enfant membre de la famille.
Le 19 mai 1874 : Interdiction du travail des moins de 13 ans et on décide de créer le
corps des inspecteurs du travail.
Ce sont des lois de protection familiale.
Le 2 novembre 1892 : interdiction du travail de nuit pour les femmes et les enfants avec
limitation progressive à 10 heures par jour du travail des femmes ainsi que pour les
moins de 18ans.
Le 13 juillet 1906 : le repos hebdomadaire obligatoire.
Ces lois
sont mal appliquées. En sont exemptées les entreprises qui se limitent à la famille :
artisanat, travail à domicile. Il faudra attendre longtemps pour voir de grande mesure
avec le Front Populaire en 1836.
On constate
que les lois sociales vont par vagues ; il y a des moments où on les développe : [1890-1906] : montée
et généralisation de la grève et 1936. Il y a en France incapacité à se réformer en douceur. C'est
à l'occasion de chocs qu'il y a des avancées sociales. La France à un rapport à la
crise particulier.
Comment
faire face au problème d'exclusion ? Il y a une tradition
caritative avec l'influence passée de l'Eglise. On est dans
une logique d'assistance. Mais qui a droit au secours ? On va séparer les bons pauvres et
les mauvais pauvres. On considère qu'on droit les invalides, ceux qui ne peuvent pas
travailler. Les bons pauvres sont ceux qu'on connaît. Ors avec la Grande Dépression est
apparu un chômage de masse, et tout ces gens apparaissent comme de mauvais pauvre : on
n'admet pas que les fluctuations économiques amènent la pauvreté.
La
société de la Belle Epoque a du mal à penser cette nouvelle catégorie : les chômeurs.
Et il faudra attendre 1906 et la loi sur l'assistance pour avancer un peu.
On aide les vieillards et les incurables mais pas les chômeurs en tant que tel.
Le
problème de la vieillesse ouvrière aussi. Il faut attendre 1910, pour voir
la loi sur les retraites ouvrières et paysannes (sont contre patronat et syndicats).
En 1913,
une aide est prévue pour les familles nombreuses et les femmes en couches. Il y a un
grand manque d'assurance sociale. Il faudra attendre les années 30 pour voir un système
naître.
2) Des institutions de régulations des conflits.
La gauche
républicaine va essayer d'aller plus loin avec une nouvelle discipline : les sciences sociales. Alors on prévoit ces
institutions. Les conflits ne sont plus considérés comme de la délinquance, mais comme
des faits sociaux. Et on
réfléchit sur le moyen de les réguler.
Alors on
crée le conseil supérieur du travail. On y discute du point de vue des patrons et du syndicat. On développe
les prud'hommes. Tout ceci est théorisé par Léon Borgeois qui crée le solidarisme, qui réfléchit sur le moyen de réguler les
conflits. C'est la doctrine de la gauche républicaine.
Décembre 1892: loi sur l'arbitrage en cas de conflit. Il est facultatif mais fortement
recommandé. La première instance est à l'échelle du canton : le juge de paix.
Mars 1919 :
il est possible de rédiger des conventions collectives : les statuts ouvriers seraient
collectifs.
Décembre 1936 : l'arbitrage est rendu obligatoire. On est au lendemain des grèves avec
occupation d'usines.
On retient
ce caractère tardif de l'intervention étatique qui est liée aux périodes de crises.
La croissance française est lente en raison du poids de l'agriculture, de
la petite entreprise, de la structure familiale et de la stagnation démographique.
Mais il y a
des conflits souvent impressionnants. On pouvait penser qu'on allait vers la révolution.
Ors elle ne bascule pas. La classe ouvrière n'occupe pas une place centrale dans la
société française : elle est encadrée par la famille et la petite entreprise. C'est
aussi l'influence du suffrage universel, grande garantie contre les affrontements. c'est
l'intégration des masses à la vie politique. Il y a cette croyance qu'on peut voter et
donc changer les choses.
Il y a
aussi le fait que la classe ouvrière ne soit pour beaucoup qu'une étape de passage, à
rapprocher avec les efforts de la république à promouvoir l'éducation. La république
se justifie par la possibilité du mérite social. C'est le système méritocratique.
Cette croyance contribue au maintient d'une certaine stabilité sociale.
La IIIème République assure sa stabilité avec
l'alliance entre la petite bourgeoisie, le monde paysan et les ouvriers.
Ce régime enracine la république avec des symboles : fête national le 14
juillet, adhérence au drapeau. Elle s'enracine dans les campagnes aussi avec l'école,
les monuments aux morts après la grande guerre. La république réussit à s'installer.
Sur la longue durée, le régime est la réponse aux questions du XIXe.
Texte établi à partir d'un cours de faculté
suivi en 1997-8
Grands Merci au professeur
Mise à jour du : 23/03/99